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Par Pierre-Jérôme Adjedj, le 28 février 2010.


           Egalité, parité : que signifient ces mots quand les femmes ne disposent pas entre elles d’une égalité d’accès au congé maternité en fonction de leur statut professionnel ? L’exemple des intermittentes du spectacle est particulièrement édifiant, et concerne d’autres catégories de travailleurs précaires. Comme si la grossesse n’était pas en soi une aventure, avec le concours de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie et de Pôle Emploi, avoir un enfant peut relever du parcours du combattant quand ce n’est pas un chemin de croix...

1. L’obtention du congé maternité

Les intermittents du spectacle sont une catégorie un peu particulière de chômeurs indemnisés. Artistes et techniciens doivent accomplir un certain nombre d’heures sur une période variant de 304 à 319 jours suivant les cas. Le régime d’indemnisation est plus favorable a priori que le régime général et prend en compte le fonctionnement spécifique des métiers du spectacle du cinéma et de l’audiovisuel ; mais à la différence d’un chômeur du régime général, l’intermittent arrivant au bout des 243 jours d’indemnisation n’ayant pas obtenu ses heures passe directement du statut d’intermittent au... RSA ! Le chronomètre tourne en permanence...

Or on imagine aisément les difficultés rencontrées par les futures mamans pour trouver du travail durant leur grossesse (notamment les comédiennes, cantonnées de fait aux rôles de femmes enceintes) ; dans ce contexte, le mode de comptage des heures par la sécurité sociale est ubuesque et prive purement et simplement un certain nombre de mamans de congé-maternité. Et comme Pôle-Emploi suspend en toute logique le versement des allocations durant le congé-maternité, indemnisé ou non par l’Assurance Maladie, certaines intermittentes se retrouvent sans un sou. On peut rêver mieux pour accueillir son enfant en toute sérénité.

2. Calcul et recalcul par Pôle-

Pour celles qui obtiennent le congé-maternité, le calvaire n’est pas forcément fini. Au moment où elles sont « réexaminées », c’est-à-dire quand Pôle-Emploi procède au calcul du nouveau taux journalier d’indemnisation à épuisement des droits sur la base des heures effectuées, une mauvaise surprise les attend : en effet, Pôle Emploi prend en compte la période du congé-maternité, à raison de cinq heures par jour, ce qui est sympathique au premier abord. Mais ces heures comptent pour zéro dans le calcul du taux journalier, qui est donc forcément très bas [a minima, 23 euros/jour, ndr] dans l’année qui suit la naissance de l’enfant (sauf pour celles qui ont énormément travaillé jusqu’au bout, ce qui encore une fois n’est pas facile).

Une deuxième mauvaise surprise attendait les mamans ayant accouché en 2008 : une erreur informatique dans le logiciel de Pôle Emploi a conduit au versement d’allocations sur la base d’un taux erroné. Quand l’administration s’est rendue compte qu’il y avait un trop perçu, Pôle Emploi a d’autorité et sans préavis retranché des sommes aux femmes concernées sur leurs allocations, pour des sommes allant de quelques centaines à plusieurs milliers d’euros.

Ces mères, regroupées sous le nom des « recalculées », ont entrepris, avec le soutien de la coordination des intermittents et précaires, vont saisir la Halde ( Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité ) pour mettre en lumière les inégalités de traitement entre les différentes catégories de travailleuses.

 

Vous pouvez les contacter : recalcules0809[at]cip-idf.org

 

Être mère et intermittente du spectacle a été publié sur le site de Touche pas aux Bluets, association, formée à la suite du comité de soutien des Bluets qui s’est donnée comme objectif de défendre l’accompagnement et la qualité de prise en charge pour la naissance. Formée de professionnels et d’usagers, Touche pas aux Bluets cherche à initier une parole qui transcende les intérêts des uns et des autres.


Note :

- en fait, lorsqu’ils ont épuisé leur droit à l’ARE, certains intermittents parviennent à ouvrir droit à l’allocation spécifique de solidarité (ASS), bien qu’il faille comptabiliser cinq ans d’emploi sur les dix ans écoulés ; pour des salariés à l’emploi discontinu, cela implique d’avoir été beaucoup employé, ou d’avoir effectué de longs CDD, ou des CDI, au moins à temps partiel ou très partiel (par exemple peu d’heures d’enseignement ou du "régime général", sur des périodes longues), ce n’est en effet pas le nombre d’heures qui compte ici mais la durée cumulée des contrats.

- certains intermittents parviennent à entrer dans le très sélectif dispositif de l’allocation de fin de droits, dernier vestige en date des fonds obtenus par la lutte contre les effets d’éviction des protocoles Unedic de 2003 et 2006.

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Présentation

  • : Le Collectif Les Matermittentes (LCLM) matermittentes@gmail.com
  • : Le collectif regroupe des femmes à emploi discontinu qui luttent pour faire valoir leurs droits en matière de congés maternité et d'arrêts maladie. Nous luttons pour une juste application des lois et règlements par la Sécurité Sociale et Pôle emploi afin que la maternité et la maladie ne soient pas synonymes d'une rupture de protection sociale.
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